William Bouguereau, Oreste poursuivi par les Furies ou Les Remords, 1862, huile sur toile, Chrysler Museum of Art, Norfolk (VA).

William Bouguereau, le néo-classique absolu

Adolphe-William Bouguereau, un nom peu facile à porter à moins de vivre pendant le XIXᵉ siècle. Raccourcissons-le simplement à William Bouguereau.
Il paraît que l’on connait tous un Bouguereau. Toutefois, l’homme dont nous allons parler est probablement le plus talentueux d’entre tous les Bouguereau (et c’est dire). En effet, il s’agit de l’un des peintres néo-classiques les plus délicieusement réalistes de la peinture académique française, pourtant dans son siècle le plus prolifique. Alors cher ami, prévenez votre propre Bouguereau que la compétition va débuter.

William Bouguereau, Autoportrait, 1879, huile sur toile, Musée des beaux-arts de Montréal.

Son œuvre

Après un apprentissage à l’école des Beaux-Arts de Bordeaux, le jeune peintre originaire de La Rochelle est admis à Paris dans l’atelier de Picot (1846). Durant l’année 1850, Bouguereau débute sa carrière sur les chapeaux de roues (hic déso) en remportant le très envié Prix de Rome qui octroie à son propriétaire une rente annuelle et une chambre dans la Villa Médicis. Cela sert un but précis, celui de permettre au gagnant d’effectuer un séjour de recherche et de pratique artistique dans la Cité Éternelle. Là-bas, Bouguereau en profite pour accroitre son talent et parfaire sa connaissance des thèmes classiques, religieux ou mythologiques.

William Bouguereau, Dante et Virgile, 1850, huile sur toile, Musée d’Orsay.

À ce moment, le style de Bouguereau se distingue par plusieurs caractéristiques :

Un réalisme méticuleux : ses œuvres sont d’une précision extraordinaire, chaque détail étant rendu avec une minutie maniériste qui témoigne d’une maîtrise technique exceptionnelle. Observez le roulis des yeux du dévoré dans son Dante et Virgile.

Une beauté idéalisée : les sujets de Bouguereau sont souvent des figures féminines idéalisées, aux traits parfaits et aux poses gracieuses. Il s’inspire alors largement de la sculpture antique et de la Renaissance italienne.

Des compositions rigoureusement classiques : souvent équilibrées et harmonieuses, les pièces de Bouguereau suivent les règles académiques les plus strictes.

Thèmes mythologiques et religieux : Bouguereau a souvent représenté des scènes mythologiques et religieuses, telles que Nymphes et satyre, sa Pietà ou sa Vierge de la Consolation, renversante et signant les prémices de l’Art nouveau.

William Bouguereau, La Vierge de la Consolation, 1875, huile sur toile, Musée des Beaux-Arts de Strasbourg.

Un succès populaire et critique

De son vivant, Bouguereau jouit d’une popularité tout de même reconnue. Ses œuvres sont appréciées par le public bourgeois et sont régulièrement exposées aux Salons parisiens. Il est également très respecté par ses pairs, qui le proposeront professeur à l’École des Beaux-Arts de Paris. Toutefois, si l’œuvre de Bouguereau est importante dans l’Histoire de l’art, elle a également fait l’objet de nombreuses critiques. Au XXᵉ siècle, l’avènement des mouvements modernes comme l’impressionnisme et le cubisme remettra en question les valeurs esthétiques de l’art académique. Bouguereau sera ainsi accusé d’avoir produit un art trop conventionnel, trop passé et trop éloigné de la réalité malgré le réalisme développé dans ses toiles.

Certes, je suis d’accord pour avouer que certaines œuvres se pâment à la vue du spectateur, par leur sensibilité puérile et leur caractère candide ; mais j’ai la chance de ne pas vivre à la fin du XIXᵉ siècle pour m’opposer ouvertement à ces propos.

William Bouguereau, L’Aurore, 1861, huile sur toile, Birmingham Museum of Art, USA.

Pourquoi redécouvrir Bouguereau ?

Malgré ces trop puériles critiques ne laissant la place qu’à la nouveauté, l’œuvre de Bouguereau reste incontournable. Pour un historien de l’art du XXIᵉ siècle, elle touche profondément l’âme par le réalisme contenu dans ses scènes religieuses, et exploite des sujets communs mais avec une sensibilité délicate. Alors il est vrai que ce dernier a peint énormément de toiles représentant des femmes et des fillettes du milieu rural, mais Bouguereau s’est aussi penché sur des concepts sérieux au plus haut point, tel que son Égalité devant la mort.

William Bouguereau, Égalité devant la mort, 1848, huile sur toile, Musée d’Orsay.

Le travail de Bouguereau sur les figures religieuses et mythologiques mérite d’être redécouvert. Son sens du détail, sa maîtrise de la technique et sa capacité à créer des images à la fois belles et émouvantes sont des qualités intemporelles. De plus, ses œuvres nous offrent un aperçu réel et fascinant des goûts esthétiques de la société française du XIXᵉ siècle.

La disparition de la reconnaissance contemporaine de Bouguereau s’explique avant tout par le manque de renouvellement des sujets exploités. Dans le même temps, Courbet expose son Origine du monde, prouvant à tous que l’art ne sert plus uniquement de support pédagogique ou spirituel.

William Bouguereau, Oreste poursuivi par les Furies ou Les Remords, 1862, huile sur toile, Chrysler Museum of Art, Norfolk (VA).

En conclusion, et si on arrêtait de bouder Bouguereau ? Car son style est la parfaite échelle entre l’Art classique, cher aux académies, et le mouvement réaliste qui vit sur la période que notre artiste. Bouguereau se sert des schémas propres au Réalisme pour développer sa peinture néo-classique. Bien que son genre, amalgamé entre le courant réaliste du XIXᵉ et les thèmes religieux classiques de la pré-Renaissance puisse sembler démodé aux yeux des contemporains, ce n’est pas le cas pour nous. Cela dit, le Néo-Classicisme vivra une brève impulsion avant de disparaitre, éphémère, dans l’Histoire de l’art.

Une seule comparaison esthétique est adaptée ici, celle avec Alexandre Cabanel auquel nous dédierons bientôt un article de ce type. Alors cher lecteur, allez contempler les expressions humaines incluses dans le Dante et Virgile ou l’Égalité devant la mort du Musée d’Orsay. Si toutefois vous habitez vers l’Est de la France, et telles les nymphes et le satyre, je vous dirige vers la très impressionnante Vierge de la Consolation du Musée des Beaux-Arts de Strasbourg.

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William Bouguereau, Nymphes et satyre, 1873, huile sur toile, Clark Art Institute, Williamstown (MA).

Cet article a 3 commentaires

  1. Chat

    Je ne connaissais pas cette Vierge de la Consolation, je l’aime tant que je la voudrais chez moi

  2. terrier christine

    Je ne connaissais pas BOUGUEREAU. Magnifique toile de Dante et Virgile que je ne manquerai pas de voir au Musée d’Orsay.

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